Stratégie marketing

Réussir avec un marketing responsable

Changer le monde par l’alimentation ? David Garbous, directeur marketing stratégique chez Fleury Michon y croit. Élu personnalité marketing en 2012 (dans le cadre des Trophées de l’Innovation Marketing), il se sent investi d’une responsabilité. Métier dévoyé depuis quelques années, David Garbous est convaincu que le marketing doit reprendre une place centrale dans l’entreprise pour mieux transformer l’offre. Faire du marketing responsable est, selon lui, la clé pour se démarquer. Il souhaite ainsi répandre cette certitude au plus grand nombre.

Vous êtes Directeur marketing stratégique chez FLEURY MICHON depuis près de 7 ans, quels ont été vos principaux défis ?

J’ai rejoint Fleury Michon suite à ma rencontre avec Régis Lebrun (ancien directeur général). Ce fut un véritable coup de cœur car il souhaitait faire évoluer l’entreprise en intégrant des sujets autour de l’engagement et la responsabilité. Le succès de mon projet d’agriculture raisonnée chez Lesieur en 2004 puis mon élection de personnalité marketing de l’année, en 2012, m’apportaient la légitimité pour porter cette ambition. Nous avions conçu mon poste autour d’une mission phare : fédérer un discours de marque commun malgré nos différentes typologies d’offres (traiteur, charcuterie et traiteur de la mer). Par cet objectif, nous pouvions passer d’un discours de marque orienté produit vers un discours orienté client en renforçant notre proximité avec ce dernier.

Toutefois, à peine 15 jours après mon arrivée, une crise majeure a impacté ma feuille de route : l’affaire Spanghero (le scandale de la viande de cheval vendu comme de la viande de bœuf). Aussi, même si les produits Fleury Michon n’était pas directement concernés., nous étions, malgré tout, mobilisés par les enjeux de réassurance qui en ont découlé. De ce scandale a découlé le défi majeur de mes 7 ans chez Fleury Michon : adresser le sujet de la confiance.

Quelles évolutions majeures ont touché votre secteur d’activité et votre métier depuis votre arrivée ?

À l’ère des communautés et des réseaux sociaux, je constate une tendance globale de défiance vis-à-vis des autorités. Le marketing doit donc repenser complétement sa façon de travailler. Cet enjeu de société est, certes, très difficile mais passionnant.

En tant que marque, nous devons reconquérir les consommateurs en travaillant l’axe de confiance. Il est désormais indispensable de miser sur la transparence et la diffusion de preuves. C’est pourquoi, chez Fleury Michon, nous avons invité les consommateurs à venir découvrir directement nos pratiques. Cette posture a notamment été l’axe principal de nos campagnes de communication pour notre produit « Surimi ». Inédite dans le secteur agroalimentaire, cette campagne a marqué les esprits et a permis d’ouvrir le dialogue avec nos clients et de partager nos convictions. Cette action a donné encore plus de poids à notre mission car intégrer des éléments de responsabilités dans notre offre s’est révélée est une réelle opportunité business.

Depuis quelques années vous avez redéfini la plateforme de marque FLEURY MICHON ? Comment la décririez-vous désormais ?

Nous l’avons formalisée très factuellement en 2014 après le succès de la campagne Surimi. J’ai alors organisé un important séminaire pour faire émerger collectivement ce qui nous réunissait en tant que Fleury Michon mais également ce qui nous distinguait. L’objectif était d’identifier notre mission, c’est-à-dire pourquoi nous nous levons le matin. De cette réflexion, a émergé la phrase suivante : « aider les hommes à manger mieux chaque jour ». Chaque mot a son importance car ils traduisent tous un engagement d’empathie, de proximité, de service et d’humanité. Notre formulation marque notre ambition d’améliorer en permanence notre offre, de n’être jamais satisfait mais d’adopter toutes les nouvelles tendances mélioratives. Nous voulons ainsi inventer les solutions d’un nouveau monde.

Depuis 2014, nous avons donc reconstruit, sur cette nouvelle base, notre plan marketing et défini de nouveaux KPIs. Cette mission claire et structurante nous a donné l’audace de changer. Dans les faits, cela se traduit par :

  • Un positionnement renforcé : Fleury Michon est la 1ère société industrielle à mettre en place le Nutriscore sur la base du volontariat.
  • Une meilleure lisibilité de la qualité de nos produits en affichant, de manière proactive, l’origine des viandes utilisées.

Ces décisions fortes nous ont beaucoup singularisés. Et nous sommes allés encore plus loin en lançant notre gamme « 0 nitrite ». Inimaginable il y a encore 5 ans, cette décision structurante a eu 3 conséquences majeures :

  • La division par deux de la durée de conservation
  • Le changement de couleur du produit
  • L’évolution du goût

Nous avons raconté notre choix et ses impacts au cours de campagnes qui ont porté leurs fruits :

  • Auprès des consommateurs : 40% de taux de réachat soit deux fois plus que les autres produits de ce marché.

Auprès des professionnels : notre campagne « anticonformiste » lors du Black Friday a été récompensée par le prix Stratégies de novembre 2019

Les enjeux nutritionnels et environnementaux sont devenus stratégiques pour votre marque. Quel est votre secret pour que votre performance soit aussi vertueuse que vos engagements ?

La constance et la cohérence : sont les piliers de nos dernières décisions : du Nutriscore à la suppression du nitrite. En prenant la parole sur ces sujets sur nos différents réseaux sociaux, nous avons générés 60% de commentaires positifs ou neutres. Nous avons donc construit un rapport de confiance avec nos consommateurs.

Selon vous, quelles sont les clés d’une plateforme de marque impactante, différenciante et qui fait sens ?

La plateforme de marque doit révéler, de façon subtile, la raison d’être du métier au-delà de l’entreprise. Il ne faut pas parler de soi mais de ce qu’on fait. Enfin pour éviter toute dissonance cognitive, il faut s’ancrer dans le concret avec des réalisations déjà enclenchées et non une intention pour demain.

Quels sont les 2 ou 3 piliers de la stratégie marketing d’une marque leader de son marché ?

Il faut s’autoriser à voir grand car il n’y a de grande réalisation qu’avec de grandes ambitions. En tant que leader, il faut s’autoriser à prendre des risques. Enfin, la gestion du temps est primordiale. Un grand leader est celui qui arrive au bon moment. Tout est une question de timing.

Quelles sont les qualités/compétences que vous recherchez chez vos équipes ?

Faire preuve de curiosité est indispensable pour sentir les tendances du marché mais aussi pour faire évoluer ses pratiques. Je partage l’approche de l’école 42 : il faut apprendre à apprendre. J’attends de mes équipes qu’elles aient une fibre intrapreneuriale pour s’inscrire dans l’approche entrepreneuriale que je porte. Enfin, la qualité d’exécution est cruciale pour ne pas gâcher une très bonne idée.

Quelles qualités doit avoir un Directeur Marketing stratégique ?

Le directeur marketing stratégique doit être une éponge des signaux forts et faibles qui l’entourent pour ne pas naviguer à vue. Pour hiérarchiser et structurer les éléments issus de cette sensibilité, il doit s’autoriser à tenter et inventer avec plaisir et enthousiasme. C’est la condition pour embarquer et convaincre d’entamer des parcours de réussite parfois plus éprouvants.

Comme pour l’ISM, la notion de transmission est au cœur du métier de directeur marketing stratégique.

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